« Le Cloud fait entrer les DSI dans une nouvelle ère »
Comment aborder son projet Cloud ? Quels critères pour choisir son fournisseur ? Quelles bonnes pratiques appliquer ? Les réponses d’Alain Hodara, ex DSI du Groupe Yves Rocher et fondateur du cabinet Alain Hodara Consulting.
Quelles sont les questions fondamentales à se poser avant de se lancer dans un projet Cloud ?
Alain Hodara : En tout premier lieu, il est indispensable de s’interroger sur le « pourquoi du Cloud ». Cela peut passer pour une évidence mais il s’agit en réalité d’une étape primordiale qui déterminera toute la suite du projet. Dans les faits, les réponses sont variées : fournir plus d’agilité à la DSI, disposer d’une plus grande réactivité face aux transformations du marché, réduire les coûts, créer de nouveaux services… En tous les cas, le choix du Cloud ne devra en aucun cas être guidé par un quelconque effet de mode, sans objectif précis.
Sur quels critères choisir son fournisseur de Cloud ?
On pourrait discerner trois grands types de critères : ceux liés à la fiabilité (garantie de délivrance sur le long terme), ceux en lien avec la qualité (niveau de service, taux de disponibilité) et enfin le prix — ou plus exactement, le rapport qualité/prix. Tout l’enjeu des DSI consiste à aligner les offres des fournisseurs sur une même base pour évaluer ce rapport — même si tous ne jouent pas forcément le jeu.
Le choix du Cloud ne devra en aucun cas être guidé par un quelconque effet de mode, sans objectif précis.
Pour le reste, la meilleure méthode dans la définition de ces critères reste de s’aligner sur la plus forte exigence des métiers. Par exemple, lorsque nous avons dû, chez Yves Rocher, mettre en place une plate-forme SAP, nous sommes allés voir chaque métier pour connaître le taux de disponibilité attendu. Pour la logistique, il était indispensable d’obtenir un taux de 99,98 %. Nous avons donc adopté cette exigence dans notre cahier des charges.
Viennent ensuite une série de critères plus spécifiques selon les entreprises : capacité d’innovation, rigueur ou agilité. D’autres encore — et c’était le cas d’Yves Rocher — auront à cœur de promouvoir le green IT tout au long de leur projet.
Quels pièges identifiez-vous au cours de ces projets Cloud ?
La première erreur serait de vouloir tout faire seul. Le Cloud incarne un projet d’entreprise. Il faudra donc embarquer dès le début la direction générale, les clients internes de la DSI, les ressources humaines et le département juridique pour sécuriser la démarche.
Un autre écueil consiste à sous-estimer la dimension contractuelle de ce type de projet. Nous avons ici affaire à des contrats IT très complexes qui mettent en œuvre des domaines réglementaires très différents (les ordonnances de la CNIL et certains articles du Code de la propriété intellectuelle) avec des acteurs eux aussi très variés (informaticiens, utilisateurs et acheteurs). S’accorder sur un contrat se révèle donc toujours plus long que prévu.
Le Cloud incarne un projet d’entreprise. Il faudra donc embarquer dès le début la direction générale, les clients internes de la DSI, les ressources humaines et le département juridique pour sécuriser la démarche.
La dernière erreur serait de négliger l’impact RH d’un projet Cloud. En basculant son infrastructure dans le Nuage, on abandonne des savoir-faire et donc des talents. Il faudra donc gérer en amont le transfert des compétences, c’est-à-dire trouver de nouveaux postes valorisants. Mais n’oublions pas de garder tout de même certains métiers en interne – notamment des architectes – pour juger des offres des fournisseurs.
Durant votre expérience de DSI, quels principaux avantages vous a procuré le Cloud ?
Chez Yves Rocher, le passage au Cloud nous a permis d’obtenir une infrastructure informatique avec un haut niveau de disponibilité. Une nécessité due à l’augmentation des ouvertures de magasins le dimanche. Ce basculement de l’infrastructure a également été l’occasion pour nous de simplifier grandement le système d’information pour gagner en efficacité et en performance. Enfin, le projet Cloud dans son ensemble a fait entrer la DSI dans une nouvelle ère. Désormais, elle prend un rôle d’orchestration primordial. Sans la DSI, les fournisseurs SaaS et l’opérateur ERP se rejetteraient la faute en cas de problème. Seule la DSI maîtrise les compétences pour guider ses prestataires et piloter l’ensemble des flux du système d’information.
Quelques mots sur Alain Hodara
Alain Hodara a réalisé l’ensemble de sa carrière dans l’informatique. Après un parcours de quelques années en SSII, il a opté pour les grands groupes internationaux : Renault, L’Oréal, Vivendi Universal Publishing et Yves Rocher dans lesquels il a passé ces 14 dernières années en tant que DSI. Alain Hodara conseille aujourd’hui les DSI sur la transformation digitale. La stratégie Cloud des entreprises et le défi qu’elle représente pour les DSI dans leur propre transformation constituent l’un de ses sujets de prédilection.